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SEPTFONDS

Un village du Bas-Quercy en Tarn-et-Garonne, ancienne bastide du XIIIème siècle.

Des vies, des histoires, un patrimoine riche... 

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Tarn et Garonne

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Février 1939 : environ cinq cent mille espagnols fuyant le franquisme quittent leur pays pour se réfugier en France.  Des camps sont construits à la hâte sur les plages du Roussillon, puis dans tout le sud-ouest. Septfonds  fait parti des sites choisis. Ce sont plus de 15000 réfugiés espagnols qui arrivent en train depuis la gare toute proche de Borredon. Parmi tous ces anonymes, militaires républicains ou civils, se trouvent des artistes : des musiciens, des peintres, des écrivains.

 

              Salvador Soria est né le 30 mai 1915 près de Valence. Très jeune, il découvre la peinture. En 1936, surpris par la guerre civile, il part au front avant d’avoir pu réaliser la moindre exposition. En 1939, il se retrouve en France, au camp de Judes à Septfonds. Le maire de l’époque, Urbain Solomiac, ayant eu connaissance de la présence de peintres au camp, obtient des autorités militaires en charge du camp, des autorisations de sorties. C’est ainsi que Salvador Soria réalise deux œuvres qui n’ont, depuis,  jamais quitté la mairie. En échange de quoi, l’artiste dormait dans les locaux même de l’hôtel de ville, grand privilège qui le sortait des conditions très dures de la vie du camp.

 

Juin 2004 : c’est Martine Soria, une de ses filles qui contacte la mairie, simplement pour avoir des photos des œuvres de son père. A partir de là, tout va très vite jusqu’à ce mercredi 30 juin ou l’artiste se retrouve dans la salle d’honneur de la mairie de Septfonds, entouré de son épouse Arlette Roldès…une Septfontoise, et de deux de ses filles jumelles Carmen et Martine. « Désormais, nous pourrons mettre un visage sur cette signature », déclare le 1er adjoint, Jean-Marc Labarta, avant de lui remettre la médaille d’honneur de la ville de Septfonds, au nom du maire et  du conseil municipal.

 

Présentes également au cour de cette cérémonie, les filles du peintre José Marti Aleu, Thèrèse et Aurore, peintre qui réalisa, avec Bonaventure Trepat Samarra, l’immense « Chemin de Croix «  qui se trouve dans la nef de l’église de Septfonds.

 

Après cette émouvante cérémonie et un repas pris en commun, Salvador Soria consacra très amicalement une heure pour donner des informations très précieuses sur sa technique et les matériaux utilisés pour réaliser ses tableaux, aux spécialistes départementaux invités à cette occasion.

             En milieu d’après midi, la famille Soria, guidée par Jean-Marc Labarta et Jean-Pierre Gros, se rendit au Mémorial du camp. Moment émouvant pour le peintre qui passa de longues minutes à observer la campagne environnante. Les souvenirs de cette période ont dû revenir en masse, mais de cela, il n’en dit mot.  Vint ensuite la visite du cimetière  des espagnols où sont enterrés 81 de ses compatriotes, morts au camp. Moment chargé d’émotion lorsque Salvador Soria lut à voix haute le poème de Rafael Alberti, gravé sur une plaque à l’entrée du cimetière et qui se termine par la phrase « no soy la muerte, soy  la nueva juventude » (je ne suis pas la mort, je suis la jeunesse nouvelle).

 

Pour finir la journée, et en « clin d’œil » par rapport au tableau représentant la fabrication du chapeau de paille (un des symboles de l’artisanat local), Salvador Soria visita la chapellerie Bason. Après une démonstration de couture de la tresse de paille, Mr Bason lui offrit une vieille machine à coudre que l’artiste emporta précieusement, comme un trophée.

 

A l’occasion des 90 ans de Salvador Soria en 2005, une importante monographie a été réalisé en Espagne, puisqu’il vit actuellement à Benissa près de Valence. Quant à ses œuvres "Septfontoises", elles sont en cours de classement au patrimoine, grâce à l’effort conjugué de la mairie de Septfonds et du Conservatoire départemental des Arts et Antiquités. La visite de l’artiste n’a fait que renforcer la détermination mise en œuvre pour atteindre ce but.

 

              Les tableaux de Soria, mais aussi des autres peintres espagnols du camp de Septfonds, Josef Ponti Musté, Joseph Marti Aleu et Bonaventura Trepat Samarra, peuvent être vus à la mairie de Septfonds et dans l' église St Blaise de Septfonds.  

    

             

 

 

 

 

Salvador Soria né le 30 mai 1915 à El Grao de València (quartier de Valencia, Espagne), décédé à Benissa (province d'Alicante, Espagne ) le 12 mars 2010. Peintre républicain espagnol exilé lors de la Retirada en Mars 1939 à Septfonds au camp de Judes. Durant son séjour sur la commune, il a réalisé deux tableaux intitulés communément : "La prise de la Bastille", inspiré de "La Liberté guidant le peuple" d'Eugène Delacroix, et "la trilogie de la fabrication du chapeau de paille", inspiré de 3 cartes postales d' époque. 

 

 

 

 

 

Tableaux exposés en mairie.

 

65 ans après avoir peint ses oeuvres à la mairie, Salvador Soria revient en famille à Septfonds.

L'artiste Salvador Soria Zapater et ses "Máquinas para el espíritu"

Il est né le 30 mai 1915 à El Grao de València (quartier de Valencia), en Espagne. Dès l’âge de 8 ans, il est intéressé par le dessin et le modelage et est fasciné par le musée des Beaux-arts de San Carlos. A l’âge de 17 ans, il s’inscrit à l'École des Arts et Métiers.  A 20 ans, il souhaite aller vivre à Paris, ville considérée comme la capitale des arts. Mais en 1936, surpris par la guerre civile, son projet est stoppé net et il part au front avant d’avoir pu réaliser la moindre exposition.


 En 1939, il se retrouve en France, au camp de Judes à Septfonds. Mais le maire de Septfonds, Urbain Solomiac, ayant eu vent de la présence de peintres espagnols au camp, réussit à prendre contact avec lui. Il peindra deux tableaux qui sont toujours restés jusqu’à présent dans la maison commune. 
Nous connaissons Salvador Soria le peintre, mais moins son travail sculptural qui a commencé au début des années 60. 


Après une trajectoire picturale dans l’expressionnisme abstrait, Soria traite de l’espace sculptural avec ses « Machines pour l’esprit ». 


- « Ces œuvres sont nées, dit-il, dans mon sommeil, de mon inquiétude précoce à être mécanicien et sculpteur. Des œuvres qui ont la particularité de se mettre en mouvement, de sorte qu'il y a beaucoup de sculptures dans une seule. Certaines ont plus de 1000 mouvements différents.


Ce sont des « machines » qui appartiennent à l’art géométrique, mais avec une touche cinétique, puisqu’elles sont capables de faire en sorte que le spectateur devienne acteur et amène toutes sortes de changements dans leur physionomie externe, grâce à leurs possibilités de rotation ».


Ainsi Salvador Soria nous amène à nous connecter au monde technologique qui nous entoure et à faire entrer le spectateur dans une atmosphère ludique et active, qu’il peut lui-même créer à partir des multiples possibilités de transformation que ses œuvres offrent.


Salvador Soria est décédé à Benissa (province d'Alicante, Espagne ) le 12 mars 2010.

 


Texte personnel.

Josef Ponti et les tailleurs de pierre.

1939. Le maire de Septfonds, Urbain Solomiac, ayant eu vent de la présence de peintres espagnols au camp, réussit à prendre contact avec eux et leur commanda des peintures afin de célébrer le 150ème anniversaire de la Révolution Française.

 

C’est ainsi que Josef Ponti Musté se retrouve tous les jours à la mairie pour réaliser ses œuvres. Mais très vite, il devient un locataire privilégié du lieu. En effet, les conditions de vie au camp faisaient qu’il arrivait tous les matins « crotté jusqu’aux genoux ». Afin de rendre ses conditions de vie un peu moins difficiles, le maire Solomiac obtint l’autorisation qu’il soit hébergé sur place. Josef Ponti et son ami Salvador Soria Zapater, un autre artiste peintre espagnol, furent donc logés à la même enseigne. Ils réalisèrent leurs œuvres à la mairie et, depuis cette époque, leurs tableaux n’ont jamais quitté le lieu.

 

Ponti réalisa des tableaux évoquant la Révolution française, mais également une œuvre sur l’activité des tailleurs de pierres, ce tableau-hommage aux hommes et au métier, qui représente deux tailleurs de pierre en plein travail. Le personnage central et principal tient une massette dans la main droite et un ciseau dans la main gauche. Il semble sculpter une croix en relief sur une dalle de pierre qui pourrait être une pierre tombale.

 

Depuis bien longtemps, sur le haut du plateau occidental de Septfonds, se trouvaient les carrières à ciel ouvert de Dardenne desquelles on extrayait la roche calcaire qui se trouvait en surface. C’était de la belle pierre de taille que l’on retrouve partout dans les constructions anciennes du village et même de la région et jusque dans le cimetière communal puisque bon nombre de caveaux encore présents, sont faits de superbes dalles en pierres de taille monobloc, souvent surmontées de croix faite du même matériau. Ainsi cette activité a fourni un noble travail à de nombreuses familles de tailleurs de pierre comme en atteste les divers recensements de la population faits autour des années 1900.

 

N’étant à Septfonds que depuis peu de temps, on peut se demander quand et dans quelles circonstances Josef Ponti à eu l’occasion de voir un tailleur de pierre à l’œuvre. Comment a t’il pu se rendre dans une carrière puisque de toute évidence le tailleur qu’il représente sur son tableau est dans une carrière dont on distingue les parois en arrière plan. Au pied de cette paroi, quelques hommes s’activent, dont un qui est en train de pousser une brouette. Ponti a peut être eu la possibilité de visiter un de ces lieux, d’observer les tailleurs et de s’imprégner de leur technique. Et en fin observateur il a reproduit ce qu’il a vu.

 

Une autre possibilité est qu’il ait eu en main des cartes postales d’époque et qu’il ait reproduit des scènes. Pour les deux personnages du premier plan, il faut certainement imaginer des personnes, des visages connues à l’époque. Il est courant qu’un peintre trouve son inspiration dans son entourage ou dans les personnes qu’il côtoie.

 

Mais pour l’arrière plan du tableau et le décor de fond, qu’en est-il ?


Dernièrement, j’ai acheté une carte postale prise dans une carrière de Septfonds dans les années 1900 (voir publication précédente). Ces cartes des carrières de Septfonds sont peu nombreuses. Et j’ai été frappé par les similitudes entre cette carte et le tableau, au niveau de l’arrière plan. Plusieurs éléments permettent d’imaginer que Ponti à tiré son inspiration de l’observation de cette carte. En regardant de près, les parois de pierre de la carrière sont très ressemblantes. Nous trouvons plusieurs personnages en activité dans des attitudes différents. Mais le plus frappant est la présence là aussi de cet homme poussant, dans le même sens, une brouette. Un détail très important que Ponti a su capter et reproduire, comme une signature, et qui n’est certainement pas une coïncidence.

 

Lors de sa visite à Septfonds le 30 juin 2004, Salvador Soria, l’ami de Ponti m’avait avoué avoir réalisé le tableau représentant Claude Joseph Rouget de Lisle composant la Marseillaise en s’inspirant d’un célèbre tableau de Isidore Pils conservé au musée du Louvres. Il m’avoua également avoir réalisé le tableau représentant la confection du chapeau de paille en s’inspirant de cartes postales du début des années 1900. Photos parfaitement connues. Il fallait juste être mis sur la piste car, effectivement, ce qui nous brûlait les yeux s’est alors révélé comme une évidence.

Ponti ne sera pas là cette fois pour le dire, mais il y a fort à parier qu’il a fait de même pour cet « Hommage aux tailleurs de pierre ».


JML - 10/2020 

Bonaventura Trepat Samarra.

Catalan né le 10 mars 1907 à La Sentiu de Sio (provincia de Lérida). Il est indissociable de son ami Joseph Marti-Aleu, puisqu'ils sont tous les deux les peintres ayant réalisé le chemin de croix actuellement présent dans la nef de l’église de Septfonds... en prenant modèle sur une fresque située dans l’église de la Conception à Montauban.


Il exerçait la profession de peintre au pistolet mais avait également des talents reconnus pour la peinture d’art. Son exil en France changea son destin. Après sa sortie du camp, il est resté à Septfonds où, après avoir été quelques temps « journalier »,  il a travaillé comme ouvrier en chapellerie à l’usine Gaillard. Il y fit la connaissance d’une certaine Marcelle Fabre... 


Bien qu’ âgé seulement de 33 ans, il connut de graves problèmes pulmonaires, conséquence des rudes semaines passées dans le froid, la neige et la boue du camp de Judes, dans des conditions de survie des plus précaires.


- « J’avais 8 ou 9 ans, témoigne H.L., et je le revois encore, un dimanche après midi je suppose, étendu sur un fauteuil, au soleil, bien fatigué, fumant sa cigarette dans la cour de l’usine Gaillard, car il logeait juste à côté. Il « s’entendait bien » avec ma tante Marcelle… Quelques temps après, il est parti pour l’hôpital et n’est plus revenu. J’ai su un peu plus tard que Mr Gaillard son employeur avait été très peiné de sa disparition car il l’aimait beaucoup ».


Hospitalisé, il décédera à l’hôpital le 24 juillet 1941 et sera enterré au cimetière voisin le 26 juillet en présence, de l’abbé Desseaux de Septfonds, de M. et Mme Gaillard ses employeurs et de ses amis espagnols dont Joseph Marti. Une photo témoigne de la présence de ces personnes. 


Huit jours après sa disparition, le 1er août 1941, naitra en ce même hôpital de Montauban, un certain Esteva Roda Gil qui deviendra ce célèbre parolier libertaire s’il en est.


Puis Trepat tomba dans l’oubli… 


Mais grâce à des photos prises à l’époque, ressorties des archives familiales de Thérèse Marti-Tabarly, fille de Joseph, son ami résidant à Septfonds, puis grâce aux archives impeccablement tenues par le gardien du cimetière de Montauban, nous avons pu localiser sa tombe.


En état d’abandon dans le carré des indigents de la section 2 du cimetière, seul un numéro et un monticule de terre marquaient l’emplacement, sans plaque ni autre indication particulière. 


Finalement, le 10 Août 2006, une plaque a été posée sur sa tombe, en présence des deux filles de son ami Marti : Aurore et Thérèse.


Bonaventura Trepat Samarra, républicain espagnol, a désormais son nom gravé à jamais sur sa sépulture qui se trouve non loin, coîncidence, de celle de… Manuel Azana. 


Photo:  fonds famille Marti-Tabarly - Bonaventura Trepat Samarra devant le café du commerce à Septfonds - 1941.

 

JML - 12/2020